Blogger Template by Blogcrowds

samedi 10 novembre 2007

Gossip / The Go ! Team - La Cigale. Paris.















Première partie :
Cajun Dance Party / Yelle / Jack Peñate / Sing Sing


 
Ce qu’en a pensé Eric :

« Même en arrivant à 16 h 20, il y avait déjà une bonne dizaine de personnes à faire la queue devant la Cigale pour la soirée la plus "people" du Festival des Inrocks (Beth Ditto rameute les foules, mais les "people", eux, je suppose qu'ils ne se font pas suer à attendre 5 heures son apparition !). Notre petite bande est en formation réduite ce soir, avec seulement Gilles B et Delphine, débarquée exprès de Bordeaux. Nous nous préparons à une longue soirée en nous installant à la balustrade, en surplomb à gauche, toujours plus confortable que le premier rang, surtout avec la scène très haute de la Cigale.

17 h 45, les jeunots de Cajun Dance Party entrent en scène pour 30 minutes de musique intense, souvent émotionnelle. Le chanteur a un look étonnant Robert Zimmerman circa 66 (ce qui n'étonne qu'à moitié, MySpace nous révélant son patronyme : Danny Blumberg), une voix rappelant par ses intonations celle de Brian Molko, et vit ses textes avec une intensité nerveuse toujours sympathique. La musique, elle, oscille entre rock adolescent élégant (une guitare hargneuse, des interventions pertinentes de claviers liquides, ajoutant une légèreté bien vue à des morceaux chargés de pathos, là encore à la manière de Placebo...) et influences indie bien digérées. Bref, rien de festif, ni de dance, ni de cajun ici, mais c'est a priori la mode de trouver désormais les noms de groupe les plus éloignés possibles de l'esprit de la musique. Danny, véritable chanteur-derviche tourneur finit quasiment ligoté par son fil de micro, et on se dit simplement qu'une telle ferveur mériterait des compositions plus inspirées.

On avait espéré un moment échapper à Yelle : fausse joie, nous aurons droit à une répétition à l'identique des 35 minutes du Zénith. Soit des textes drôles (« je me moque des copains » de TTC, « j'écris une chanson sur mon gode ») très tendance - mais sans plus -, des rythmes techno qui bénéficient ce soir d'un son excellent et bien plus fort que pour le 1er groupe, et une voix insignifiante, voire irritante. Yelle chante mal, danse mal, frôle le ridicule (mais cela ne semble gêner personne) : le plus drôle est que, dans la pénombre, on dirait presque un travelo, avec son visage masculin et ses trémoussements grotesques, ce qui serait dans doute plus intriguant que le personnage de la petite provinciale défiant le public parisien.

Jack Peñate a eu l'idée brillante de ressusciter la pop/soul frénétique des Housemartins, un grand groupe injustement oublié aujourd'hui : pour cela, nous il lui sera beaucoup pardonné. Seulement, Jack n'a pas la voix de Paul Heaton, et soutenu par une seule section rythmique, il est constamment écartelé entre la nécessité de poser sa voix pour honorer ses mélodies, et la furieuse envie de jouer du rock le plus frénétique et destroy possible. Très sympathique, donc, tout cela, mais un peu insuffisant : au final, on n'a ni la beauté des compositions, ni la fureur électrique, seulement l'épilepsie et les glaviots (Jack veut-il relancer la mode des crachats ? Il y excelle en tout cas...). On applaudira l'effort, mais le passage le plus réussi du concert sera la reprise déjantée du Dub be good to me de Beats International, le groupe de Norman Cook/FatBoy Slim (encore la connexion Housemartins !). Alerte "people" pendant le changement de matériel quand Julien Doré, encapuchonné, passe derrière nous (merci Clément, pour l'avertissement !)...

Enfin, enfin, enfin... Un groupe qui met le feu à la salle et transforme la Cigale en fournaise : The Go ! Team ne ressemblent pas à grand-chose ("un joyeux bordel", dixit Clément), ni physiquement, ni musicalement : un assemblage hétéroclite de musiciens qui s'échangent leurs instruments, un kaléidoscope de musiques hétérogènes qui n'auraient sans doute jamais dû se rencontrer, tout au moins dans un monde sain d'esprit... Du hip hop marié à du country bouseux, du garage punk enflé par des cuivres (sur bandes, malheureusement), une sorte de big band qui aurait trop avalé de vitamines C et aurait décidé qu'il est beaucoup plus drôle de mixer des chants de pompom girls avec des fragments de Sonic Youth tout en sautant en l'air (petits pois mexicains de tous pays, unissez-vous !) que de respecter la moindre règle musicale. Que du bonheur, donc !... et la salle répond comme un seul homme aux exhortations de Ninja, la petite chanteuse black montée sur ressorts. On sort de ces 50 minutes lessivés (un son brouillon mais indiscutablement puissant) même si on n'était pas dans la fosse à porter des slammers à bouts de bras... mais aussi le sourire aux lèvres : c'est bon, même si on n'y comprend rien.

Changement de matériel pour le dernier groupe de la soirée, quand stupeur, un sinistre sire (Sing Sing) vient débiter deux chansons (en français) morbides et ridicules devant le rideau. Cela ressemblerait à une plaisanterie, si ce n'était pas aussi pitoyable et sinistre. Quelque part entre hommage mortifère aux traditions US et chanson française grotesque, Sing Sing pue franchement, et nous ramène aux années de plomb où il semblait que nul en France ne saurait jamais faire de musique simplement écoutable. Il sort dans l'indifférence polie du public, alors que la décence aurait voulu qu'on le pende par les couilles...

Il est presque 22 heures quand Gossip entre en scène, et la Cigale change immédiatement d'ambiance, se mue en mer de bras et en forêt de visages extatiques : pas de doute donc sur la raison du "sold out" de ce soir, Beth Ditto est une (petite mais vraie) star. Beth est incroyablement sympathique, gentille même (on voit sa préoccupation constante que ses fans ne se blessent pas en essayant de l'atteindre), mais, pendant 55 minutes, elle va chanter LA MEME chanson, en usant du même jeu de scène et des mêmes effets : au troisième couplet, vas-y que je me mets à hurler, en espérant que cela rende tout le monde fou... et ça marche. Le groupe est riquiqui : une batteuse tatouée et mignonne, pas fulgurante, et un guitariste / bassiste qui a piqué ses lunettes à Elton John et sa frange aux magazines de mode ds années 80 lus dans le salon de coiffure de sa tante, et qui fait tout, c'est-à-dire pas grand'chose (on n'est pas chez les White Stripes, il n'est pas question ici de virtuosité). La voix de Beth, pas avantagée par un son simplement honnête, à la fois pas assez fort et saturé, est plus juste que dans les enregistrements vidéo que j'avais vus, mais sa tendance à beugler la classe quand même pour moi dans la caste des chanteuses "pénibles". Tout cela ne gâche aucunement le plaisir des spectateurs, qui semblent tous passer la meilleure soirée de leur vie, pourvu qu'ils arrivent à monter sur scène trente secondes pour toucher Beth, voire l'embrasser ou chanter avec elle : cette animation perpétuelle, avec les filles et garçons de tout âge qui grimpent sur scène pour témoigner de leur amour, puis repartent en un slam joyeux après que les deux mastards du S.O. les aient gentiment refoulés, rend indéniablement le concert intéressant, surtout du point de vue de voyeurs que nous avons depuis la balustrade. Beth fait chanter What's Love Got to Do... a capella à la foule, confirmant ce que j'avais toujours pensé : derrière la passionaria soul-punk, il y a une petite fille dont le grand rêve est de devenir la nouvelle Tina Turner. Enfin, c'est Standing In the Way of Control, LE tube, et sans doute la seule bonne chanson que Gossip ait écrit : c'est la folie générale dans la salle, c'est très émouvant, tout le monde essaye de monter sur scène, quelques unes y parviennent, pour chanter avec Beth. Quelques minutes de chaos qui font paniquer les videurs, déjà épuisés par les descentes de la star dans la fosse, le rideau se referme, c'est fini.

Un court rappel, la dame revenant en combinaison noire mettant en valeur ses formes qui n'en ont pas besoin, la musique qu'ils jouent n'a visiblement aucune importance, ce qui est essentiel pour les fans, c'est de toucher Beth, de manière de plus en plus ouvertement sexuée (les cuisses, les seins), ce qui scandalise ma voisine, bonne bourgeoise coincée qui s'est incrustée "poliment" entre Clément et moi, mais révèle plus que tout autre chose de quoi il s'agit ce soir : pas de musique, non (car, à mon avis, Gossip est un groupe franchement médiocre), mais d'une célébration vaguement revancharde du sexe non régi par la marketing planétaire. Il fallait donc bien voir la douce Beth en 2007, avant qu'elle ne retourne à l'anonymat du Sud profond des USA, ou qu'elle ne devienne à son tour une baudruche commerciale de plus. Mais j'espère sincèrement que l'avenir me donnera tort.

PS : En sortant, au milieu d'une cohue épuisante, seconde alerte "people" : nous croisons Jarvis Cocker (merci, Clément !).»





Aucun commentaire: