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jeudi 14 février 2008

Neil Young - Le Grand Rex. Paris.










Première Partie: Pegi Young

Ce qu’en a pensé Gilles :

« Décembre 2007 : comme tous les matins, je consulte la liste des concerts sur le site de la Fnac, et je sens un frisson me parcourir tout le corps. Neil Young au Grand Rex ! Et deux soirs de suite, s'il vous plait ! Je clique et là, je prends un coup derrière les oreilles : 135 euros pour une place à l’orchestre !!! Véritablement du foutage de gueule, scandaleux, quelque part de l'arnaque. Pas étonnant, c'est Live Nation qui organise, pas des philanthropes ces gens là... Et le pire, c’est qu’ils ont raison : la preuve, je prends ma place... Mais sans rigoler, c'est inadmissible des prix pareils ! Moi, j'ai la chance d'avoir des revenus suffisants pour me payer ma place, mais beaucoup n'auront pas cette chance... d'où mon coup de gueule et mon indignation (et l'artiste dans tout ça, il en pense quoi, est-il au courant du prix éhonté des places ?) Quoi qu'il en soit, je réserve 2 places, D05 et D07, on sera bien placé, au troisième rang, presque au centre. Les amis sont prévenus, Eric viendra le même jour que Gilles P et moi, Vincent et les 2 Philippe iront eux le vendredi. Il est vrai que, avec un prix plus modique, j'aurais opté pour les 2 soirs !!

Mercredi 13 février, je réécoute attentivement « Chrome Dreams II », certainement le meilleur album de Neil Young depuis bien longtemps. Je me remémore la dernière fois que je l'avais vu, c'était il y a maintenant 21 ans en 1987 à Bercy ! Mais le souvenir que toute notre bande garde de Neil Young, c'est bien sûr son fabuleux concert de l'Ile St Germain en septembre 1982, une tuerie à l'époque. Tout le monde connaît ses récents problèmes de santé, la question se pose donc : dans quel état sera-t-il ce soir ? Je quitte le boulot tranquillement, pas la peine de partir plus tôt avec les places numérotées (cela a au moins un avantage). Je me gare vers l'Olympia, puis marche à pied vers le Grand Rex par un froid de canard. Pas de queue en arrivant devant la salle, il est environ 18h45, j'attends l'arrivée de Gilles P qui ne tarde pas. Les portes viennent d'être ouvertes, on rentre pour se réchauffer, cela me permet de mater tranquillement le stand conséquent de Merchandising. Beaucoup de gens achètent, pas mal d'étrangers ce soir avec parmi eux des Espagnols, Italiens, Anglais et Hollandais. Moi je me contente d'un tee shirt blanc, pas mal mais pas donné (30 euros). On gagne nos places sous la houlette d'une jeune et jolie ouvreuse dont c'est le premier concert : après quelques hésitations, elle trouve nos places. L'avantage du Rex, c'est que le confort est total, avec des sièges moelleux, trop peut-être pour un concert rock ? La salle se remplit tout doucement d’un public assez hétéroclite, des anciens mais aussi un public plus jeune (qui aurait été certainement plus nombreux si le prix des places...) Je vais me prendre une bière, l'ami Eric arrive enfin, il est placé lui sur la droite, on discute pendant un bon moment. La scène est assez bizarre ce soir, encombrée de nombreux amplis et divers instruments, mais, plus surprenant, il n'y a pas de rideau au fond, ce qui fait que l'on aperçoit toute la machinerie du Grand Rex, dont l'imposant monte-charge.
Les lumières s'éteignent, la salle n'est pas encore pleine et c'est la femme de Neil Young, Pegi, qui apparaît, entourées de 3 musiciens (dont 2 joueront avec Neil). Que dire ? De la country toute simple, pas vraiment inspirée, Pegi a une bonne voix mais sans plus. Je n'ai pas vraiment accroché. Pas indispensable donc. Mais le public est bon prince et lui fera un bon accueil. Pratiquement 45mn, trop longues à mon goût.
Nouvelle entracte avec des speakers qui nous disent de ne pas faire de photos avec nos téléphones portables, ça perturbe le son de Neil Young (prend nous pour des cons, mon gars !), mais le pompon sera quand un des sus nommés speaker, celui qui causait en Français en l'occurrence nous a annoncé - sûrement sous l'effet de l'alcool - que les chansons de ce soir avaient été choisies par Neil Young !!!!!! Mince alors, je ne savais pas, moi !! Enfin, passons... L'excitation commence maintenant à monter insidieusement en moi. Ce soir, ce n'est quand même pas un concert de rock ordinaire : c'est une légende que l'on va voir ! Oui, Neil Young est devenue au fil des années une légende, un monstre, certainement le seul rescapé des sixties à pouvoir encore produire de bons disques. Oui c'est sûr, ce mec-là, il est toujours à la page, il est intemporel, respecté de tous le monde, c'est un MONSIEUR tout simplement.
Ovation quand les lumières s'éteignent, et, de suite, un choc : merde il a gravement vieilli le Loner !!! Presque un vieillard, marchant lentement, le visage et le corps ont grossis, moins de cheveux aussi, les gestes sont au ralenti, il ressemble de plus en plus à un acteur que peu de jeunes doivent connaître mais dont les plus anciens se souviendront : Fernand Ledoux, même visage !! Son costard couleur crème est taché de peinture, en effet un peintre derrière la scène est en train de peindre des toiles où se trouveront inscrits les morceaux que Neil va interpréter (à priori ces toiles feront l'objet d'une vente pour une association ou quelque chose comme ça...). Bon, c'est un set acoustique qui se prépare, Neil s'asseoit sur un tabouret, entouré d'au moins 6 guitares toutes à portées de la main. Devant lui, une petite table où est placé un récipient rempli d'eau pour pouvoir tremper ses harmonicas. Et c'est parti ! Je suis rassuré, la voix est là, parfaite et reconnaissable entre toutes. Il y a quelque chose d'un peu irréel à entendre Neil Young enfoncé dans ces énormes fauteuils, c'est difficile à dire mais les concerts au Grand Rex ont ceci de particulier, c'est qu'on ne se sent pas dans une salle de concert... Je vais certainement en irriter plus d'un, mais ce début de concert est une sorte de cauchemar pour moi (bon, j'exagère un peu...).Je m'endors pratiquement dans mon fauteuil, les 2 ou 3 premiers morceaux ne m'intéressent pas, tout simplement, je ne ressens rien à part un ennui profond. Mais (oui il y a toujours un mais), Neil se dirige alors sur sa gauche vers le piano, surmonté il me semble par un orgue, et là, premières sensations et premiers frissons, superbe interprétation de A Man Needs A Maid : émouvante, touchante, interprétée par un homme fatigué qui a vieilli prématurément, le son de l'orgue m'émeut avec par dessus LA VOIX. Et pourtant, c'est loin d'être mon morceau préféré de « Harvest », mais ce soir, c'est tout simplement beau et rempli d'émotions. On regarde Neil hésiter, aller vers ses guitares, repartir vers son piano, puis rebrousser chemin, toujours avec ces gestes lents. Et quel spectacle quand il décide de choisir l’un de ses harmonicas : petit cérémonial consistant à le tremper dans le récipient rempli d'eau je suppose, puis à le tapoter pour faire évacuer l'eau, le tester avant de le placer sur son support qu'il porte autour du cou. Tout cela dans un silence religieux, le Grand Rex est devenu une cathédrale ce soir (à part une hystérique à la Mezzanine qui gueulera 2 ou 3 fois). Il est clair que les morceaux de « Harvest » sont ceux qui me touchent le plus, pour le reste je suis quand même plus dubitatif, ce n'est pas ma tasse de thé, moi ce que j'aime c'est le Neil Young électrique, celui que même les punks respectaient. Tout au long de ce set acoustique, on aura droit a des anecdotes (Vraies ou fausses ? Qui sait !) sur sa grand mère, ou sur le musicien qui possédait l’une de ses guitares, et qui malheureusement s'est fait tirer dessus et en est mort : la guitare en gardera des souvenirs, nous dit Neil en nous montrant le soit disant impact de la première balle sur la caisse de la guitare. « Vous pouvez rire de cette histoire ! », lance-t-il goguenard au public, « mais pas de la suite de l’histoire qui a vu la deuxième balle tuer le propriétaire de cette guitare ! ». On retrouve cette flamme ironique dans les yeux de Neil, tout content de lui... Après un peu plus d'une heure de show acoustique, il se retire sous les ovations du public.
Eric vient nous revoir, on confronte nos opinions sur cette première session acoustique, lui a trouvé cela très bien, voir, excellent, Gilles P lui aussi a bien aimé, moi j'ai un avis plus que mitigé, je me suis quand même légèrement ennuyé : l'acoustique, seul, même si on s'appelle Neil Young, j'ai beaucoup de mal, sauf si les morceaux sont géniaux (ce qui était le cas pour quelques uns d'entre eux). Une bonne dizaine de roadies s'affairent maintenant sur la scène, les gens commencent à se masser devant la scène et je suis surpris de voir que personne ne les en empêche (ce qui avait été le cas pour le set acoustique).
Il ne doit être pas loin de 23 heures quand Neil Young et sa bande apparaissent sur scène. La bandoulière de sa Gibson porte toujours le signe de la paix, je retrouve le Neil que j'aime et le verdict va tomber dans quelques secondes... Ouf c'est bon !! Enfin !! Mr Soul débute le show électrique, le son est là, toujours le même, reconnaissable entre tous, unique, tel que je l'aime, crade et jouissif. Seul problème, l'amplification n'est pas assez puissante pour que cela soit parfait à 100%, dommage ! Mais je suis heureux de retrouver enfin le Loner électrique et virevoltant, maniant la guitare pour lui tirer des sons primitifs et rustiques. Bon début de show, grand début de show je dirais même ! Après un morceau extrait de « Zuma », c'est au tour de « Chrome Dreams II » d'être à l'honneur avec un Dirty Old Man des familles : gros son rêche et rugueux, refrain facile à retenir, c'est du tout bon, du pur Neil Young comme on l'aime. « Chrome Dreams II » toujours avec Spirit Road, un bon morceau assez traditionnel. Les musiciens autour de Neil ne bougent pas beaucoup, il faut dire qu'ils sont presque de la même génération, on aura d'ailleurs droit à une présentation en règle avec en final, Ralph Molina, le vieux compagnon de route qui le suit depuis les sixties. Mais il est clair que c'est bel et bien Neil Young qui tient les rennes de ce concert, qui lui donne une âme. Léger passage à vide ensuite, ou plutôt une série de morceaux que personnellement je n'apprécie que modérément, mais retour à « Chrome Dreams II » véritablement à l'honneur ce soir sur ce set électrique avec The Believer, et surtout un extraordinaire (et je pèse mes mots) No Hidden Path, véritable fresque électrique, solos apocalyptiques dont seul Neil Young à le secret, mais sont-ce vraiment des solos ? Plutôt une longue complainte, où l'on voit enfin le Loner torturer sa guitare comme au bon vieux temps de « Rust Never Sleeps ».Tout simplement grandiose, une odyssée du rock en immersion totale de 20 minutes, cela aurait été parfait avec un son plus fort mais quelle claque !!! On se regarde avec Gilles P, monumental ce morceau en version live ! Enorme ovation, le groupe se retire, on fait maintenant des suppositions pour le rappel. Cortez The Killer, oui ou non ?
Et bien ce sera non malheureusement ! Mais le rappel n'en sera pas pour autant insignifiant, avec tout d'abord une excellente version de Cinnamon Girl (classique parmi les classiques), puis de Like A Hurricane, où l'on verra une orgue descendre du ciel surmonté d'un ange. Version honnête mais sans plus, j'ai déjà vu mieux... Voila après un salut de tout le groupe (dont sa femme Pegi qui faisait les chœurs), Neil Young s'éclipse définitivement après 2h20 / 2H25 de concert.
Pas de Hey Hey My My, il semblerait que ce morceau ne soit pas du tout prévu dans la tournée. Dommage, mais nous ressortons avec quand même le sentiment d'avoir vu l’un des derniers "anciens grands artistes en activité", et sûrement le seul à avoir encore une activité créatrice de premier ordre. Si seulement on pouvait se repasser en boucle ces 20 minutes de bonheur total que nous a procuré No Hidden Path ce soir, ce serait le paradis. Il ne reste que notre mémoire (et maintenant notre blog) pour que ces instants restent éternellement irréels. Dehors le froid vif nous surprend, pas beaucoup de paroles seront échangés pendant notre marche vers ma voiture, nous sommes encore dans notre concert à essayer de nous souvenir de tous ces petits instants précieux, pour essayer de les figer à jamais dans nos mémoires. Demain, ce sera au tour de nos camarades d'aller au Grand Rex, je regrette un peu de ne pas y retourner, mais il faut savoir être raisonnable devant le prix exorbitant du billet. »







Neil Young est auteur-compositeur-interprète et guitariste de folk, country et rock canadien. Il est devenu l'un des musiciens les plus respectés et influents de sa génération. Commercialement, son apogée se situe au début des années 1970 avec les albums After The Gold Rush et Harvest en plus de son rôle dans le très populaire groupe Crosby, Stills, Nash & Young.









2008 European Chrome Dreams Continental Tour Band

Neil Young - guitar, guitjo, harmonica, piano, vocals
Ben Keith - pedal steel, lap steel, guitar, organ, background vocals
Rick Rosas - bass, background vocals
Ralph Molina - drums, background vocals
Pegi Young - background vocals, vibraphone
Anthony Crawford - background vocals, piano



Fake
Heterosexual Masses
When The Wildlife Betrays Me
Sometimes
Sometimes Like A River (Loving You)
?
Love Like Water
Number Nine
Wrestle Awhile
La durée du concert : 0h39


PART ONE
From Hank To Hendrix (Harvest Moon – 1992)
Ambulance Blues (On The Beach – 1974)
Sad Movies (Unreleased Song from Archive - 1976)
A Man Needs A Maid (Harvest – 1972)
No One Seems To Know (Chrome Dreams - 1977)
Harvest (Harvest – 1972)
Journey Through The Past (Journey Through The Past – 1972)
Mellow My Mind (Tonight's The Night – 1975)
Love Art Blues (Homegrown album is an Unreleased – 1975)
Don't Let It Bring You Down (After The Gold Rush – 1970)
Cowgirl In The Sand (Decade – 1977)
Out On The Weekend (Harvest – 1972)
PART TWO
Mr. Soul (Buffalo Springfield Again – 1967)
Don’t Cry No Tears (Zuma – 1975)
Dirty Old Man (Chrome Dreams II - 2007)

Spirit Road (Chrome Dreams II - 2007)
Bad Fog Of Loneliness (Live At Massey Hall 1971 – 2007)
Winterlong (Decade – 1977)
Oh, Lonesome Me (After The Gold Rush – 1970)
The Believer (Chrome Dreams II - 2007)
No Hidden Path (Chrome Dreams II - 2007)
ENCORE
Cinnamon Girl (Everybody Knows This Is Nowhere – 1969)
Like A Hurricane (American Stars 'N Bars – 1977)

La durée du concert : 2h25

AFFICHE / PROMO / FLYER





























Neil Young: Spirit Road - photo montage




Neil Young - Continental Tour 2008 - Paris. Le Grand Rex. 14/02/2007

Neil Young - Le Grand Rex. Paris.










Première Partie: Pegi Young

Ce qu’en a pensé Eric :

« Je trouve d'abord qu'il y a toujours quelque chose de surréaliste à aller voir un concert de rock dans la salle du Grand Rex, avec ses profonds sièges en cuir qui invitent plus à piquer un roupillon qu'à vibrer sur des solos au lance-flammes, et avec, ce soir, ses spectateurs très "middle-aged" (j'ai vu plus d'une femme en robe de soirée !). Bon, d'abord j'en fait partie de cette putain de génération des enfants de 68, qui ont rêvé avec Neil d'un monde meilleur (... enfin, non, pas lui !), avant de le voir arriver, ce monde meilleur, et de le faire sombrer corps et biens. Ensuite, qu'espérer de plus d'un musicien de 62 ans, rescapé d'une attaque cérébrale, qui nous demande de cracher 135 Euros pour le voir ? Même après des décennies à vénérer littéralement Neil Young (à mon avis l'un des pilliers de la musique américaine contemporaine), le perspective de cette soirée ne me remplit pas, vous l'aurez compris, d'un enthousiasme démesuré.
Ce soir, problème d'avion et tout, j'arrive seulement une 1/2 heure avant l'heure officielle du début des hostilités, et le plaisir de nos habituelles conversations (les deux Gilles sont là aussi, mais à une autre rangée de sièges - les places étant numérotées) est réduit à sa portion congrue...
20 h 35 : on attend Neil... Ben Keith et Rick Rosas montent sur scène, et puis... non, c'est à sa femme Pegi qu'on a droit ! "Les cheveux blonds, ça lui va moyen à Neil" plaisante quelqu'un, derrière moi. 40 minutes d'une country nashvillienne et traditionnelle sans une once d'inspiration : bien chantée, bien jouée (forcément !), entrecoupée de ces déclarations terriblement gentilles et lénifiantes, tellement américaines qui, quelque part, font peur (sur la St Valentin, sur la belle salle, etc. etc.), une musique d'une insignifiance consternante... Qui, par contraste, souligne le génie de Neil d'avoir su tirer pendant 40 ans des joyaux de cette gangue collante et informe qu'est la musique country (Comme il le dira plus tard avec son habituelle ironie vaguement hargneuse : "Il y a aux USA un genre de musique qui s'appelle country music, et il yest d'usage d'écrire des chansons sur sa camionette et sur sa mère")... Après cette paisible souffrance, bien accueillie quand même par un public trop aimable, 15 minutes d'entr'acte...
21 h 30 : Neil débute son set solo, et la première impression, même si on l'a vu sur les DVDs récents, est que l'hiver de sa vie est arrivé. Entre chaque chanson, à le voir déambuler entre ses instruments, on a l'impression qu'il est un peu perdu, et derrière cette nouvelle nonchalance, se dégage une certaine tristesse. Neil évoque le souvenir de sa grand mère qui jouait du piano bastringue dans une ville minière, et on craint un instant qu'il n'enfourche les vieilles chimères du "c'était mieux avant"... Mais c'est l'humour noir et acide qui ressurgit, et après un démarrage assez inquiétant ("Ambulance Blues", quasiment jamais jouée sur scène et donc inespérée, n'a plus guère de sa noirceur angoissante...), au fur et à mesure que les chansons s'enchaînent, il me semble que la silhouette de Neil grandit, que la dureté qui a toujours contrasté avec la fragilité de certaines de ses plus belles chansons, réapparait. Musicalement, la voix est toujours belle, même si elle a finit par perdre cette tonalité enfantine qui la rendait exceptionnelle, et la virtuosité stupéfiante à la guitare est là, au point peut-être même de rajouter un soupçon de complexité à des chansons tellement parfaites qu'elles n'en ont pas besoin. Summum du set, "Cowgirl in the Sand", d'une beauté et d'une sécheresse à couper le souffle : des frissons partout, et les larmes aux yeux. Juste derrière dans le top des grands moments du set, "Harvest", si rarement jouée, et "Don't let it bring you down" tellement jouée, elle, mais quasiment intacte après presque 40 ans. 1 h 05, et Neil quitte la scène.
Encore 25 minutes d'entracte... qui permettent de "se réaligner" un peu avec les copains et aussi de s'éloigner de l'atmosphère pesante qui règne autour de moi, entre un Anglais furibard de s'être fait piquer sa place pendant la première partie, et mon voisin de derrière, sorte d'ayatollah de Neuilly-en-Sarkozy que la lumière de l'écran de mon Lumix indispose ! Sur scène, les roadies essayent de mettre un peu d'ordre dans l'indescriptible capharnaüm qui y règne, entre une foule d'instruments et de décors bizarres, aussi laids qu'inutiles (mais on est habitué à l'humour tordu et pas drôle de Neil, aussi bien qu'à son perfectionnisme obsessionnel en ce qui concerne le son)...
23 h 00 : la partie électrique du set commence seulement, et je me prépare à une courte nuit, la malchance voulant que je doive me réveiller demain à 4 h 30 à nouveau pour filer sur Lyon. "Mr Soul", d'emblée, nous confirme ce que la lecture de la set list du concert d'Anvers 3 jours avant nous avait fait comprendre : Neil va nous emmener dans un "journey through the past", avec l'objectif de retrouver la flamme et l'innocence de ses premières années. Et, de fait, ce soir encore, le concert sera consacré au début des années 70 et au dernier album, dans un grand écart ne laissant pas de place pour les flamboyantes et tonitruantes années 90. Et, peu à peu, le miracle "électrique" se produit : même si on n'a pas Crazy Horse sur scène (le fin Ben Keith ne jouant clairement pas le même rock boueux et lourd que Frank Sampedro, ce qui laisse Neil seul responsable de déchainer la tempête), même si le son - excellent - est ridiculement bas pour un concert de Neil, le charme opère : au bout de quelques morceaux, Neil semble avoir perdu (gagné ?) 10 ans, et retrouve ces poses hargneuses et échevelées (même s'il ne lui en reste plus beaucoup, de cheveux) que nous adorons lui voir prendre depuis des décennies. Sur le côté droit de la scène en face de moi, un peintre expose sur un gigantesque chevalet ses peintures - laides au possibles, mais on connait les goûts de chiottes de Neil -, censées illustrer chacun des morceaux (heureusement qu'y figure le titre de la chanson, d'ailleurs). Neil, lui, est maintenant d'humeur à plaisanter, ce qui veut dire que son regard "au rasoir" et son sourire de loup traduisent son habituelle méchanceté : il faut l'entendre présenter Rick Rosas, avec lui depuis 20 ans, comme "un nouveau venu dans la bande... D'ailleurs nous avons discuté pour la première fois aujourd'hui...!". Ceux qui, comme moi, on eu la chance de lire l'extraordinaire biographie de Neil écrite par X savent que c'est là la probable vérité...

L'honnêteté m'obligera à ajouter que le set "électrique" ne sera pas une tornade de bout en bout, Neil faisant redescendre (un peu trop) la pression en enchainant un lugubre "Bad Fog of loneliness" et son anecdotique version de "Oh Lonesome Me", qui ravira pourtant les spectateurs, en plein trip "nostalgie". Mais, indéniablement, et le respect que nous avons tous je pense pour le "Loner" vient aussi de là, ce qui intéresse Neil, c'est de jouer ses nouveaux morceaux, variant du jouissif (l'obscénité rigolarde de "Dirty Old Man"... Oui, Neil aime toujours le "pussy"...) à l'épique ("No Hidden Path", sommet de la soirée, superbe cavalcade échevelée et lyrique, avec un Neil, vieux tigre furieux, grimaçant face aux soleils glaçants des spots... Impressionnant !), en passant par le simplement splendide ("Spirit Road", grande composition, avec son refrain incantatoire, malheureusement peu partagé par une foule sans doute ignorante des "Chrome Dreams II").

Rappel, pour conclure près de 2 h 25 de bonne et belle musique, avec un "Cinnamon Girl" impeccable et un "Like a Hurricane" dont le démarrage épique m'a fait dresser tous les poils du corps (quelle chanson magnifique, sans doute toujours la plus belle écrite par Neil, avec cette vision de l'amour tornade emportant tout, même si en son centre, y règne le calme...!). Le problème de "Like a Hurricane", c'est qu'à force d'avoir constitué "l'acmé" de centaines de concerts, il est désormais difficile de ne pas avoir l'impression de refaire une nième fois le même tour de montagnes russes, malgré les efforts de Neil de renouveler l'attaque de ses soli. L'autre problème, c'est que "No Hidden Path", un quart d'heure plus tôt, avait été tout simplement parfait...

Mais ne faisons pas la fine bouche, si ce n'était l'erreur stratégique du choix de la salle (ambiance compassée et son insuffisant), on aurait sans doute assisté ce soir à un nouveau concert légendaire de Neil Young. Dans l'état des choses, ça n'aura été qu'un très beau concert ! »