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mercredi 24 octobre 2007

Mika - Le Zénith. Paris.













 Support Act : YELLE





Ce qu'en a pensé Eric :


« Première sortie en concert de sa vie pour ma fille Emilie, grande fan de Mika à 8 ans. Pas question donc d'aller au premier rang dans un Zénith que l'on prévoit bondé d'adolescentes surexcitées et de familles "pépères", et Vincent et moi gardons des places au premier rang des gradins, dans le bloc restant après que près de 300 places aient été réservées aux invités (un scandale trop habituel !).

20 h 15 : Yelle monte sur scène, avec ses deux musiciens - un batteur et un aux keyboards. Tout de suite, la voix extrêmement irritante de la demoiselle, et la naiveté (on dira sympathique, pour être gentil) du jeu de scène du trio désarçonne un peu. Si les montées en rythme techno déchainent l'enthousiasme de la fosse, force est de reconnaitre la grande médiocrité des morceaux, au point qu'on se demande pourquoi Yelle reçoit régulièrement le soutien de critiques d'ordinaire plus crédibles. Bon, "Je veux te voir" et la reprise de "A cause des Garçons" en version techno concluront agréablement un show heureusement assez court. Peu de talent quand même là-derrière !
21 h 20 : Le rideau se lève sur un décor impressionnant, sorte de music hall baroque d'un mauvais goût assez puéril. Un énorme ballon bleu semble flotte au centre de la scène alors que les musiciens entrent en scène, il éclate pour révéler un ange : très kitch, tout cela, et pas forcément rassurant sur ce qui va suivre (la fascination de Mika pour Freddy Mercury va-t-elle jusqu'à lui faire adopter les outrances écoeurantes de Queen, l'un des groupes que personnellement j'ai toujours le plus détestés ?). Mais non, Mika déboule, vrai ange (lui), tout de blanc vêtu, et une nouvelle ressemblance me frappe : en fait, le beau jeune homme filiforme qui va courir, sauter, haranguer la foule sans répit durant l'heure et demi qui va suivre - sans que la justesse de sa voix n'en soit jamais altérée, au point que les mauvaises langues prétendent que ses hallucinantes montées dans les aigüs sont aidées de playback ! - est surtout le Mick Jagger de ce début de siècle. C'est "Relax", le tube absolu du moment, horriblement matraqué sur les ondes, repris dans les pubs et les BO de films, qui ouvre le show, et la large partie féminine et adolescente des 7000 personnes présentes commence à hurler et à sauter en l'air. Le son est un peu décevant, et les basses trop présentes, saturant souvent la voix précieuse de Mika, nous priveront de certains moments d'émotion sur des "Any Other World" ou "Happy Ending" forcément inférieurs aux versions épurées de l'album. Non, ce soir, Mika nous offre avant tout un show spectaculaire, traduisant clairement une sorte de générosité naïve de post-adolescent encore émerveillé par son propre succès (planétaire, mais très fort en France). Mika parlera d'ailleurs beaucoup à la foule entre ses chansons, d'un Français impeccable, sans accent (témoignage de ses huit ans passés à Paris dans son jeune âge), avec l'excitation heureuse d'un enfant qui voit ses rêves se réaliser ("Avant je répétais mes nouvelles chansons tout seul dans ma chambre, aujourd'hui je le fait devant 7000 personnes !", dira-t-il avant de présenter l'une des deux nouvelles chansons, pas tout-à-fait aussi impressionnantes que les "vieilles", avouons-le, qu'il jouera ce soir).
Si le groupe de Mika n'est clairement pas un groupe de virtuoses, il se dégage de chacune des chansons une énergie heureuse qui dynamite gaiement tout risque de professionalisme arrogant : d'ailleurs, voir Mika interrompre une chanson pour faire replacer son piano afin de mieux voir la foule, opération durant laquelle il aidera lui-même les roadies (!), montre bien que la perfection du show n'est pas l'objectif ce soir, mais bien une certaine complicité festive, qui deviendra sans doute de plus en plus impossible au fur et à mesure du succès grandissant de sa musique. Car, c'est clair, Mika en est encore dans sa tête à chanter dans des salles de la taille de la Maroquinerie devant des lecteurs des Inrocks, et ne réalise pas pleinement que son public est aujourd'hui composé d'adolescentes qui vivent leurs premiers émois sexuels en fantasmant sur son visage d'ange et sa démarche sautillante.
Plus les minutes passent, plus la musique gagne en puissance... "Big Girls" a très tôt mis la barre bien haut, mais c'est avec une reprise musclée de "Missionary Man" (Eurythmics encore, à la place d'un "Sweet Dreams" qui n'était pas ce que Mika faisait de mieux...) que le concert passe à la vitesse supérieure, avant de logiquement exploser sur un "Love Today" bien plus rock que le reste du show, qui se terminera d'ailleurs par une longue et jouissive session de percussions enthousiastes et enthousiasmantes : à mon avis, de toute évidence, toujours la meilleure chanson de Mika, et le sommet pour ce soir.

Il est temps pour moi de descendre dans la fosse pour tenter d'approcher le phénomène de plus près. Curieusement, je n'ai aucune difficulté à me frayer un chemin jusqu'au premier rang, les adolescentes hypnotisées par leur idole se comportant paradoxalement avec une certaine retenue (si l'on se souvient par exemple de la foule hystérique au même endroit, il y a 6 mois, pour Arctic Monkeys, le contraste est frappant). Me voici donc quasimment au premier rang, à mon tour frappé par la beauté et la gaieté qui se dégage de Mika, et par l'aspect purement "Jaggerien" de son jeu de scène. "Grace Kelly" lui permet de faire rugir ses influences ("Little Freddy..."), avant le rappel, qui s'ouvre avec un hilarant théâtre en ombres chinoises : les musiciens sont tous déguisés en animaux en peluche géant, un "Bad Rabbit" vient semer la zizanie à coup de kung fu, avant que Mika, crocodile armé d'un fusil, ne vienne remettre de l'ordre dans tout cela. Tout explose, et c'est évidemment "Lollypop", toujours une merveille, second sommet de la soirée : d'énormes ballons sont déversés sur la foule, des canons crachent les confettis, c'est la fête, un moment de pure joie enfantine. A la fin, un sourire jusqu'aux deux oreilles, Mika "balancera" (délicatement quand même) sa "batteuse" sur les bras tendus de la foule, et le groupe hilare quittera la scène avec des bye byes ironiques à la pauvre fille, emportée et dérivant au milieu du Zénith dans un slam involontaire. Court retour en second rappel pour marteler une seconde fois "Relax", et d'où je suis, les infra-basses sont surpuissantes, et font vibrer le béton du sol du Zénith. C'est la fin.
Emilie a eu la chance de voir un très beau concert pour sa "première fois", même si, clairement, une heure vingt cinq de show, c'est un peu long à son âge. A la sortie, un vendeur de posters "pirate" lui offrira d'ailleurs une grande photo de Mika "dédicacée", de quoi orner sa chambre. Et de quoi oublier la nuit froide d'Octobre, et croire ce soir que les miracles arrivent : un jeune homme peut devenir une star en quelques mois sans rien perdre de sa grâce et de sa gentillesse. Même si on sait que cela ne durera pas, pourquoi ne pas se satisfaire ce soir de l'illusion que la vie est une fête joyeuse ? »







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