Première partie : KIM NOVAK
« Iggy Pop l'avait dit au moment de la reformation de ses Stooges : "Nous, c'est pas comme tous ces groupes qui soit-disant se reforment, alors qu'il n'y a plus qu'un ou deux mecs du groupe original, et que les autres sont des jeunes qui sont payés pour jouer à l'identique les chansons de l'époque !". Et je dois dire que j'étais assez d'accord avec lui... jusqu'à ce soir, où j'ai compris qu'il fallait bien avoir vingt ans de moins que David Gedge pour tenir la cadence infernale avec laquelle il descendait les unes après les autres les mini-iques de "George Best". Et comme Gedge lui-même l'a dit en présentant l'un des morceaux : "Celle-là est une chanson euh... lente. Dans cet album, ça veut seulement dire en fait qu'on ne la joue pas le plus vite possible". Bref, ce soir, à la Maroquinerie, peu importe qui étaient les trois jeunes musiciens - ravis - derrière Gedge, c'était bien The Wedding Present sur scène, et les oreilles qui nous sifflaient à la sortie ont bien confirmé que nous avions assisté à 21 chansons jouées "en tir tendu", comme le confirmait, ravi lui aussi, Bruno à la fin !
La soirée avait même bien commencé, avec Kim Novak (joli patronyme pour des fans de la grande Novak comme Gilles B et moi...), groupe français à peu près inconnu au bataillon, mais qui, en toute justice, ne devrait pas le rester. 12 chansons (en 50 minutes), dont une bonne moitié d'excellentes compositions, et un vrai talent à faire se terminer un morceau sur deux en décharge sonore excitante. Dommage que la voix du chanteur, entre Robert Smith et Pete Shelley, n'ait pas tout à fait l'envergure que leur musique, ambitieuse et intelligente, mériterait. A la fin, le lead guitariste est descendu jouer au milieu de la salle, ce qui n'est pas si habituel, après tout. Excellente surprise.
Quand Gedge monte sur scène, la Maroquinerie est bien remplie, et le public n'est pas tout jeune, pas mal de quadragénaires, cinquantenaires, voire plus. On sent bien la nostalgie d'une "grande" époque : Bruno est même là, et ce sera la 13ème fois qu'il voit The Wedding Present live (5ème fois quand même pour moi, même si j’ai surtout en tête le prodigieux concert de Portsmouth en 1989). Après un morceau d'intro, peu convaincant et avec un niveau sonore insuffisant, les choses se mettent rapidement en place : dès Brassneck, on se dit que le plaisir devrait être au rendez-vous. Gedge nous explique, dans un français relativement correct, le principe de la soirée : ils vont jouer "George Best" dans son intégralité (la version originale en vinyle, ce qui me privera quand même de l'un de mes morceaux préférés du CD, Getting Nowhere Fast), et dans l'ordre, en fait... Et comme pour se faire mentir lui-même, il se met à enchaîner d'autres chansons, y compris une reprise ma foi assez correcte de l'époque de "Cinerama". Puis, l'une des roadies (car The Wedding Present, pas macho, a des filles comme roadies !) monte sur scène, nous fait un compte à rebours, carton à l'appui, et "Everyone thinks he looks daft" lance les choses sérieuses. Quatre chansons plus tard, quand une superbe version de A Million Miles cède la place à un All This and More survolté, la cause est entendue : cette musique est toujours excitante au possible, même si le son n'a plus tout à fait l'abrasivité d'il y a 20 ans. Derrière nous, deux excités lancent des "Obrigado, obrigado" avec l'accent paulista, et cela me fait un petit plaisir de plus de savoir qu'il y a des Brésiliens dans la salle pour savourer cette "madeleine électrique". Avant d'entamer My favourite Dress, Gedge se lance dans une conversation hilarante avec le public, et directement avec moi, au premier rang, d'ailleurs, lorsque je le mets gentiment en boîte parce qu'il se vante de son stand de merchandising. Sympa, ce n'est pas tous les jours qu'on peut plaisanter avec l'une de ses idoles de jeunesse !
Une fois "George Best" terminé dans une pluie de riffs cisaillés sur l'Ibanez de Gedge (Patricia me fera remarquer qu'il jouait tellement vite qu'on ne voyait même plus ses doigts !), il est temps de terminer cette belle soirée électrique en apothéose : d'abord, une magnifique version de Perfect Blue, très émouvante malgré l'évidente absence des trompettes mariachi et du folklore Morriconien, et prouvant que Gedge a encore des choses à dire, suivie par notre déflagration préférée de l'époque "Bizarro", Kennedy, apple pie et tuerie impeccable. Et puis, un final extraordinaire avec Flying Saucer, l'une des chansons les plus "funs" de The Wedding Present". Pas de rappel bien sûr, comme la tradition l'exige et comme Gedge nous l'a confirmé. Mais qu'importe, ce soir, nous avons eu notre dose d'électricité.
Petit regret, le niveau sonore, très élevé certes, mais pas aussi démentiel qu'il y a 15 ou 20 ans, à une époque où l'on sortait les oreilles en sang des concerts de The Wedding Present. »
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