Première partie : Holy Fuck
« 22h00 au Trabendo : !!! jouent depuis 45 minutes déjà leur funk hardcore excitant, et tout le monde a un grand sourire aux lèvres, en s'agitant dans tous les sens, quand ÇA se produit... la vague sonore enfle comme un tsunami, la section rythmique redouble d'intensité, les exhortations de Nick Offer montent d'un ton... on sent la tension qui explose dans le public. C'est l'hystérie générale ! C'est... L'ORGASME pur et simple... comme dans une vie de rocker on en a vécu une petite dizaine seulement sans doute. On me parlait récemment de l'existence de techniques permettant la jouissance sexuelle sans aucun contact physique... Ne cherchez plus, allez voir !!! sur scène. Car le pire, c'est que, durant les 30 minutes et 3 morceaux qui suivirent, ils renouvelèrent la "performance" 3 fois ! Mais revenons en arrière de trois bonnes heures...
C'est très rare que j'aille à un concert sans rien connaître de la musique d'un groupe, mais l'enthousiasme de Gilles B suite au passage précédent de !!! à Paris était tellement communicatif que je n'ai pas hésité à tenter l'expérience - malgré les rumeurs alarmantes des semaines précédentes quant à la défection de l'un des 2 chanteurs du groupe. Il y a une bonne ambiance à l'entrée du Trabendo, avec un Vincent particulièrement en forme pour revenir sur les mauvaises surprises de ces derniers jours (Amy Winehouse, Siouxsie). On rigole, on rigole et on oublie le froid. Une fois dans la salle, bien installés devant la toute nouvelle barrière qui fournit un certain confort au premier rang, on continue à bien s'amuser, en gardant toutefois un oeil vigilant sur les Anglais qui commencent à envahir la salle (toujours un signe inquiétant, ça !).
Le premier groupe s'appelle Holy Fuck, nous révèle Vincent avec un air gourmand. Et en plus ils sont Canadiens, nous apprennent-ils (... comme une bonne partie des bons groupes actuels, me direz vous...!). Mais surtout, ils nous offrent une bonne demi-heure d'excellentissime musique, quelque part entre Chemical Brothers et My Bloody Valentine (le genre), soit une sorte de transe de dance-floor, instrumentale, mais articulée autour d'une rythmique rock puissante et déjantée : la palme revenant au batteur, "frog prince" terrassant, mêlant une technique sans faille à une énergie très juvénile. Quelques décollages soniques intenses pour notre plus grand bonheur, beaucoup de délires et de bidouillis électroniques aussi drôles qu'excitants, et au total encore une preuve que la musique se renouvelle sans cesse, et trouve toujours de nouveaux terrains d'excitation. Superbe première partie.
Quand les 7 membres de !!! déboulent sur la scène "agrandie" du Trabendo et entament leur premier morceau, on a tout de suite l'envie irrésistible de sourire. Imaginez une résurrection des Talking Heads de l'époque "Remain In Light", les mélodies en moins (personne n'est parfait !), mais la folie furieuse en plus, à la place de l'intellectualisme narquois de Byrne & Co ! Ou encore une petite dose de hardcore injectée dans de la house ! Le Trabendo, bien bourré ce soir d'un public jovial et bigarré (on retrouve ma voisine naine du concert d'Arctic Monkeys, toujours au premier rang ; on discute avec un étudiant en architecture originaire de Washington DC qui demande au photographe de service de lui dessiner - non pas un mouton - mais son appareil photo !), est tout de suite saisi par le démon du funk, ça se trémousse partout sur les riffs des deux guitares bien tranchantes comme on les aime, avec une section rythmique diabolique en action (pas moins de deux batteurs !). Mais le clou du spectacle, c'est bien sûr Nick Offer, ex-chanteur hardcore, qui a ramèné son "jusqu'au-boutisme" radical sur le dance-floor, et se révèlera un diabolique manipulateur de foule, faisant monter la pression de manière assez extraordinaire. Nick passe les trois quart de son temps au contact frontal avec le premier rang (nous, en l'occurence !), en équilibre sur la barrière, ou sur les côtés pour aller chercher les danseurs les plus récalcitrants : une véritable BÊTE ! D'ailleurs, on le verra mimer une masturbation derrière le rideau latéral lors du rappel, lorsque l'énergie sexuelle dans la salle deviendra quasiment insupportable.
Sur plusieurs morceaux, Nick est secondé par une petite chanteuse black hip hop, qui injecte dans la musique un modernisme urbain bien venu, et qui sera au final celle qui ira le plus loin ce soir : nous la verrons agripper la tête d'un jeune et mignon spectateur du premier rang, la plaquer sur son bas ventre en l'enserrant entre ses cuisses, puis basculer en avant dans la fosse dans cette position peu ambigüe, avant de lui rouler une longue pelle au milieu des premiers rangs éberlués. Hot Hot Hot !
Il est 22 h 00 au Trabendo, et quelque chose s'est libéré entre le groupe et son public. Le concert bascule vers une jouissance à la fois sexuelle et cérébrale monstrueuse. Tous les visages sont convulsés, le son est devenu démentiel, chacun des 3 morceaux qui reste devient l'occasion d'une nouvelle cérémonie païenne. C'est le dernier concert européen d'une tournée de 7 mois pour !!! et ce soir, il faut que tout finisse en beauté. On est tous là à jurer que l'on a rarement vécu une telle transe, et pourtant, ça recommence encore. Et encore. On n'a pas envie que ça s'arrête. Mais ça va s'arrêter, inévitablement : un dernier pic d'extase, et ils partent. La petite black ne veut pas non plus nous quitter ainsi, elle se jette à nouveau sur son petit fan du premier rang, et lui roule une galoche longue d'une bonne minute : quand leurs bouches se séparent, on voit les fils de salive, c'est très émouvant tout ça ! Patricia a seulement la chance de serrer la main du beau guitariste qui quitte la scène, dommage (?)...
22 h 30 : on n'en croit pas nos oreilles ni nos yeux. Vincent déboule du fond de la salle, il est extatique lui aussi : "EXCELLENT ! Tous les concerts devraient être comme ça !". Il parle de vague sur laquelle on pouvait surfer. Je sens qu'il va nous faire un compte-rendu épique, légendaire ! On n'a pas envie de partir, parce qu'on sait qu'on vient de vivre l'un de ces concerts exceptionnels qui vont rejoindre le panthéon de nos nuits les plus inoubliables.
Dehors, on croise encore une fois la petite black qui se rue vers le bus du groupe les bras pleins de bouteilles de vin rouge. On espère secrétement que son jeune amoureux de cette nuit est déjà dans le bus, à l'attendre, et que pour eux deux, la fête va continuer. »
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